La cour administrative d’appel de Nancy annule la délibération du 21 décembre 2022 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes du Pays de Sainte-Odile a approuvé le règlement fixant les conditions de délivrance des autorisations de changement d’usage des locaux d’habitation en meublés touristiques de courte durée.
Par un arrêté du 27 juillet 2022, la préfète du Bas-Rhin en rendu applicable sur une partie du territoire de la commune d’Obernai les dispositions de l’article L. 631-7 du code de la construction et de l’habitation prévoyant un régime d’autorisation préalable de changement d’usage des locaux destinés à l’habitation. Par une délibération du 21 décembre 2022, le conseil communautaire de la communauté de communes du Pays de Sainte-Odile a, en application de l’article L. 631-7-1 du même code, approuvé le règlement fixant les conditions de délivrance des autorisations de changement d’usage des locaux d’habitation en meublés touristiques de courte durée à Obernai. Saisi par plusieurs sociétés professionnelles de l’immobilier, le tribunal administratif de Strasbourg a, par un jugement du 15 juin 2023, annulé l’article 7 de ce règlement ainsi que la délibération du 21 décembre 2022, en tant qu’elle approuve cet article.
Par un arrêt du 19 novembre 2025, la cour administrative d’appel de Nancy, allant au-delà de l’annulation partielle décidée par le tribunal administratif de Strasbourg, prononce l’annulation totale de cette délibération du 21 décembre 2022.
Pour cela, la cour a retenu deux illégalités :
En premier lieu, la cour relève que le régime d’autorisation instauré par la délibération impose une compensation par la transformation concomitante de locaux ayant un autre usage que l’habitation en locaux d’habitation de même superficie et de même qualité que le logement faisant l’objet de la demande d’autorisation de changement d’usage en meublé touristique, quelle que soit sa taille, dès le premier logement pour les personnes morales et dès le troisième pour les personnes physiques. La cour, qui doit apprécier les faits à la date de la délibération en litige et donc en décembre 2022, estime que ce régime est disproportionné à l’objectif de lutte contre la pénurie de logements sur la commune d’Obernai, au regard notamment du droit de propriété, du principe d'égalité et de la liberté d'entreprendre. En effet, alors que le taux de vacance des logements à Obernai était proche de la moyenne nationale, le marché du logement dans cette commune se caractérisait alors par une hausse continue des loyers et une pénurie de logements seulement pour ceux inférieurs au T3 et pour des ménages aux revenus modestes. Par ailleurs, le niveau de participation du marché des meublés de tourisme à la pénurie de logements doit être apprécié relativement à son poids limité dans le parc de logement. Or l’impact réel de ce marché sur la hausse des loyers sur le territoire communal jusqu’en 2022 n’est pas établi par les éléments produits devant la cour. La délibération attaquée est donc illégale pour cette première raison.
En second lieu, le premier alinéa de l’article 4 du règlement litigieux qui fixe les conditions d’octroi de l’autorisation de changement d’usage prévoit que : « l’autorisation de changement d’usage est accordée en tenant compte des objectifs de mixité sociale, d’équilibre entre l’habitat et l’emploi et de la nécessité de ne pas aggraver l’insuffisance de logements ou le niveau élevé du prix des loyers ». Cette disposition, qui ne fait que reprendre les objectifs légaux sans fixer clairement les critères devant être appliqués par le maire, ne respecte pas la condition de clarté et de non ambiguïté posée par l’article 10 de la directive européenne du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur. La délibération du 21 décembre 2022 est donc illégale également pour cette seconde raison.
Le Conseil d’Etat peut être saisi d’un recours en cassation dans un délai de deux mois.
> Lire la décision : CAA Nancy, 19 novembre 2025, n° 23NC02695